Le soutien par les pairs a vu le jour il y a plus d’un siècle, lorsque l’on embaucha d’anciens patients en psychiatrie rétablis pour assister le personnel soignant. Pendant les années 1960 et 1970, quand s’amorça le processus de désinstitutionalisation, certains des patients ayant quitté les établissements psychiatriques allèrent chercher du soutien auprès de groupes de pairs. Dans les années 1980, les groupes de soutien par les pairs prirent de l’ampleur, soit indépendamment ou au sein d’organismes comme l’Association canadienne pour la santé mentale et la Société pour les troubles de l’humeur du Canada. ~ Extrait du livre L’évolution de la santé mentale en milieu de travail au Canada – Vers une norme en matière de santé et sécurité psychologiques | PDF
Le soutien par les pairs a évolué, en partie en réaction à un système clinique qui n’offrait pas de services adéquats aux personnes ayant des troubles de santé mentale ou de dépendance. Les pairs estimaient pouvoir s’aider eux-mêmes et aider d’autres personnes avec plus de compassion. Ils croyaient aussi que leurs groupes offraient un soutien plus efficace que celui disponible au sein du système médical officiel. C’est ainsi que la valeur et l’efficacité du soutien par les pairs ont bénéficié d’une reconnaissance grandissante. Les organisations aidaient les personnes aux prises avec des troubles tels que :
- l’alcoolisme;
- la sclérose en plaques;
- le cancer;
- les maladies du cœur;
- le diabète.
Selon Shaleen Jones, ancienne directrice générale de Peer Support Canada (PSC), le soutien par les pairs peut être associé à :
- une augmentation des soins centrés sur le patient;
- une approche de recherche axée sur le patient;
- une compréhension accrue de l’apport positif des personnes ayant une expérience vécue.
Ces dernières années, les organisations font des progrès au chapitre du soutien par les pairs en milieu de travail. Parmi les initiatives mises en place, on compte notamment des programmes structurés et supervisés en milieu de travail qui offrent aux pairs aidants une formation et une accréditation portant sur des lignes directrices éthiques et pratiques. Ces programmes aident les employés qui ont des problèmes de santé mentale à obtenir des ressources efficaces. Ils appuient également la réussite des organisations en réduisant les taux d’absentéisme et d’invalidité. Les avantages du soutien par les pairs peuvent donc s’étendre à l’ensemble de l’organisation.
Selon la Commission de la santé mentale du Canada (la Commission), le rôle du pair aidant consiste à offrir un soutien émotionnel et social à des personnes ayant un vécu similaire au leur. En 2010, la Commission a publié le rapport Le soutien par les pairs : une nécessité puis en 2013 les Lignes directrices relatives au soutien par les pairs – formation et pratique | PDF (les lignes directrices). Cet ouvrage décrit les principes du soutien par les pairs ainsi que les aptitudes innées et les habiletés acquises que les pairs aidants doivent maîtriser.
L’histoire de Stéphane Grenier est particulièrement pertinente par rapport à l’évolution du soutien par les pairs en milieu de travail. À la suite d’une mission au Rwanda de 1994 à 1995, il a vécu des difficultés pendant des années avant de recevoir un diagnostic de stress post-traumatique et de dépression. Comme pour beaucoup de ses collègues, le modèle de soin traditionnel proposé n’était pas suffisant. Des conversations avec des personnes ayant vécu des expériences similaires lui ont donné de l’espoir. Elles lui ont également montré une voie vers son propre rétablissement. Ces interactions ont fait ressortir l’importance et la valeur du soutien social au travail.
La Commission a détaché monsieur Grenier de son poste au sein de l’armée canadienne. Il a dirigé l’initiative qui est à l’origine des lignes directrices et des normes nationales régissant la pratique du soutien par les pairs. Les normes définissent les exigences qui sont nécessaires pour offrir des services de soutien par les pairs avec diligence et compétence dans divers contextes. Les normes définissent :
- les connaissances requises;
- les compétences requises;
- l’expérience requise;
- un code de conduite.
Monsieur Grenier a ensuite créé l’organisme de bienfaisance Peer Support Accreditation and Certification Canada(PSACC). S’appuyant sur les normes de pratique élaborées par la Commission, PSACC a créé un processus d’accréditation pour aider à élever la pratique du soutien par les pairs au Canada comme complément aux soins cliniques. On doit à cet organisme un solide programme d’accréditation pour les pairs aidants et les pairs aidants familiaux. PSACC est maintenant connu sous le nom Peer Support Canada (PSC) (disponible en anglais seulement).
Monsieur Grenier explique qu’un pair aidant est une personne qui parle de son expérience vécue d’une manière bienveillante dans le but :
- de créer un lien;
- d’offrir de l’écoute;
- de comprendre et d’aider une personne vivant une situation similaire à la sienne.
« Le soutien par les pairs repose sur une relation d’entraide et de compréhension mutuelle, ce qui, en soi, constitue un moyen très puissant d’aider une personne en difficulté à avoir prise sur sa propre vie. L’idée est que, si le pair aidant a pu se rétablir, la personne aidée peut avoir de l’espoir et s’en nourrir pour son propre rétablissement. L’espoir est un facteur très important », explique monsieur Grenier. Il ajoute qu’un pair aidant choisi et formé avec soin est souvent la seule personne capable d’apporter cet espoir.
En milieu de travail, beaucoup de gens ont encore une vision négative des problèmes de santé mentale. Or, la stigmatisation exacerbe souvent la maladie. Un programme de soutien par les pairs est un moyen concret d’aider les employés. Il aborde aussi directement la stigmatisation ou la discrimination associées à la maladie mentale. Pour reprendre les mots de monsieur Grenier : « Imaginez une organisation qui permet aux employés ayant une expérience vécue d’aider les autres en milieu de travail. » Ainsi, lorsqu’un employé vit des problèmes de santé mentale, il reçoit le message :
- qu’il peut continuer à travailler;
- qu’il est important;
- qu’il est acceptable de se comporter comme un être humain au travail.
Il ajoute que les milieux de travail devraient certainement envisager d’offrir un programme de soutien par les pairs pour :
- mieux soutenir les employés;
- réduire les taux d’invalidité de courte et de longue durée;
- mettre en place des programmes de prévention primaire en santé mentale.
Peer Support Canada s’est récemment associé à l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM). « Sous l’égide de l’ACSM, PSC met en contact les pairs aidants et les organisations, contribue à la diffusion de l’information et aide au renforcement des capacités pour le soutien par les pairs, » explique Shaleen Jones, directrice générale, Soutien par les pairs, ACSM.
« Un programme de soutien par les pairs ne peut régler à lui seul tous les problèmes qui surviennent dans un milieu de travail, surtout si l’organisation n’a pas pris d’engagement envers la santé et la sécurité psychologiques de ses employés, poursuit-elle. Cependant, lorsqu’un employeur met en place un programme de soutien par les pairs qui respecte sa culture, sa mission et sa clientèle, et qu’il a l’appui d’un champion au sein de la haute direction, l’expérience peut être transformatrice. »
De plus amples renseignements sont disponibles sur le site Web de Soutien par les pairs Canada à l’adresse www.peersupportcanada.ca (disponible en anglais seulement).
Ressources supplémentaires
- Pairs aidants. Apprenez comment obtenir du soutien d’un pair au travail ou comment devenir vous-même pair aidant. Le pair aidant s’appuie sur son propre vécu pour aider les gens qui font face à une situation semblable à la sienne.
- Programmes de soutien par les pairs. Apprenez comment établir un programme de soutien par les pairs dans le cadre d’un milieu de travail psychologiquement sécuritaire et en accroître l’efficacité grâce à des stratégies provenant d’experts en la matière.