Écouter pour comprendre – pour les leaders

Il s’agit d’une approche pour vous aider à intervenir auprès d’une personne qui peut être bouleversée ou en situation de crise. Vous serez en mesure de mieux comprendre le point de vue de l’autre et d’éviter l'augmentation du niveau de détresse.

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Le programme La santé mentale au travailMC a élaboré à l’origine le concept « écouter pour comprendre » pour combler l’écart entre l’écoute active et la réaction à une personne en détresse. L’écoute active est une façon répandue d’être respectueux et attentif  lorsque quelqu’un parle. Elle consiste notamment à demeurer concentré sur son interlocuteur, à lui prêter son attention et à lui répondre de façon appropriée. Toutefois, de nombreuses personnes qui ont maîtrisé cette technique risquent encore d’être exaspérées par la réponse qu’elles obtiennent (ou par l’absence de réponse) lorsqu’elles l’appliquent à quelqu’un qui est bouleversé ou qui peut avoir un problème de santé mentale, comme une dépression ou un trouble lié à l’anxiété.

Le concept « écouter pour comprendre » permet de se doter des stratégies d’aide ci-après pour mieux comprendre le point de vue d’une personne en détresse sans causer d’autres torts.

Découvrez notre court module d’apprentissage en ligne qui comprend des concepts clés ayant trait à ce sujet. Vous pouvez le transmettre à d’autres personnes ou l’utiliser dans le cadre d’un programme d’apprentissage plus approfondi.

Permettre des pauses

Beaucoup de tensions et de problèmes de santé mentale résultent de pensées répétitives. La personne entretient dans sa tête un monologue interminable qu’elle n’arrive pas à arrêter ni même à ralentir. Elle peut vous sembler impassible, tout en étant encombrée, dans son for intérieur, de pensées constantes, troublantes ou périodiques.

Si la personne est déprimée, cela peut prendre la forme de pensées négatives répétitives sur elle-même, sur autrui ou sur le monde en général. Il peut aussi s’agir de pensées de découragement, de désespoir ou de suicide. Dans le cas d’un trouble lié à l’anxiété, l’autre personne peut avoir des pensées répétitives (et, souvent, des sensations physiques) concernant un malheur imminent, une crainte ou une inquiétude. Dans ces cas, la concentration est difficile.

Lorsque vous demandez à quelqu’un ayant de tels ennuis « Qu’est-ce qui ne va pas? », la réponse qui semble être une longue pause silencieuse n’est peut-être pas un refus de vous répondre. Peut-être est-il submergé par un flot de pensées ou de questions, par exemple :

  • Ai-je confiance en vous?
  • Si je vous le dis, à qui allez-vous le répéter?
  • Votre estime de moi diminuera-t-elle si je vous le dis?
  • Voudrez-vous vous débarrasser de moi ou me refuser une promotion si je vous dis ce avec quoi je dois composer actuellement?
  • Que devrais-je vous dire?
  • Jusqu’à quel point devrais-je vous communiquer des informations?
  • Penserez-vous que j’invente cette histoire de toutes pièces?
  • Penserez-vous que je manque de maturité?
  • Par où pourrais-je seulement commencer?
  • Quels mots est-ce que je vais utiliser?
  • Et si je me mets à pleurer?
  • Et ainsi de suite…

Si vous interrompez la pause observée par votre interlocuteur, vous interrompez le cheminement de ses pensées et vous risquez de l’empêcher de s’exprimer. Respectez ses pauses. Si, à l’instar de bien des leaders, vous n’êtes pas habitué au silence, sachez que, même s’il vous rend mal à l’aise, il peut amener chez l’employé le déblocage dont vous avez besoin pour comprendre son point de vue. Lorsque vous êtes calme et que vous lui donnez le temps de réfléchir, il sentira moins de pression et sera mieux en mesure de vous répondre.

N'oubliez pas que ce n’est pas à vous qu’il incombe de poser un diagnostic ou de donner des conseils concernant les problèmes de santé ou personnels d’un employé. Une fois que vous aurez compris son point de vue, ce qui représente votre objectif ultime, vous pourrez vous concentrer sur votre tâche : aider l’employé à être efficace au travail. Lorsque nous sautons à des conclusions ou que nous faisons des suppositions sur ce qu’une personne éprouve, nous sommes plus susceptibles de fournir la mauvaise solution. Même si le point de vue de la personne ne vous semble pas réaliste, une fois que vous le connaissez, vous êtes beaucoup mieux placé pour travailler avec elle et trouver des solutions.

Gérer les expressions des yeux

Savez-vous que la majeure partie du langage corporel provient de la région entourant les yeux? Rappelez-vous une fois où quelqu’un vous a menti. Avez-vous senti que vous plissiez quelque peu le coin des yeux vers le bas? Pensez à quelqu’un qui est porté aux exagérations ridicules. Résultat : non pas le même mouvement des yeux, mais un mouvement tout de même. Pensez à une personne adorable. Il est probable que vous ayez involontairement levé les yeux

Certains disent que les yeux sont le miroir de l’âme; toutefois, dans notre contexte, nous craignons qu’ils ne soient le miroir de vos doutes, de vos jugements ou de vos critiques sur la personne en détresse qui est en face de vous. Sans vouloir renoncer à une seule de vos pensées intérieures, vous laissez vos yeux exprimer ces sentiments.

Certains ont demandé s’ils devraient porter des lunettes de soleil ou fermer les yeux lorsqu’ils parlent à une personne en détresse. Heureusement, nous avons une meilleure solution, appelée « faire preuve d’ouverture d’esprit ». La région entourant nos yeux réagit à notre monologue intérieur – nos pensées sur autrui et nos idées. Lorsque nous croyons que quelqu’un nous ment, ce sont nos doutes intérieurs qui déclenchent notre réaction. En arrêtant ou en ralentissant notre monologue intérieur, nous pouvons gérer le mouvement involontaire des yeux. La façon de le faire (sans hypnose ni médicament psychotrope) est d’occuper l’esprit avec un message unique – « Et quoi d’autre? ». En nous montrant curieux envers l’autre personne, nous pouvons maintenir notre ouverture d’esprit, d’où l’expression « faire preuve d’ouverture d’esprit ».

Cette attitude peut être très importante lorsque vous traitez avec des personnes pouvant être en détresse, dépressives ou anxieuses. Si elles sentent que vous les jugez ou que vous doutez d’elles, il sera normal qu’elles se méfient de vous. Travailler avec elles ou les gérer sera alors beaucoup plus difficile.

Différer l’évaluation ou les conseils

Bien des leaders sont en position d’autorité parce que quelqu’un a cru qu’ils étaient capables de faire face à la pression, d’analyser des situations, de prendre des décisions rapides et d’arriver à des solutions. Toutes ces aptitudes sont importantes, mais elles peuvent, bizarrement, avoir un effet boomerang lorsque vous traitez avec des employés en détresse. En effet, les personnes en détresse peuvent avoir du mal à exposer clairement ce qu’elles ressentent et encore plus de difficulté à énoncer leurs besoins. Plus nous les pressons de trouver des solutions, plus nous avons l’occasion d’aggraver la situation. Nous pouvons le faire en érodant leur confiance en nous, leur capacité de gérer le stress au travail et, en dernier ressort, leur confiance en soi.

De plus, nous avons peur d’être blâmés si nos solutions échouent, même si nous faisons appel à des experts et lisons des ouvrages sur le sujet. Lorsque nous aidons vraiment l’employé à trouver lui-même la solution, il sera beaucoup plus déterminé à réussir, même dans les moments difficiles. C’est dans la nature humaine de mettre plus d’efforts dans nos propres plans de réussite que nous le ferions pour les plans qui nous sont imposés par d’autres.

La capacité d’écouter pour comprendre a un seul but : comprendre le point de vue de l’autre personne. Il ne s’agit pas de fournir la solution – qui viendra plus tard. Vous pouvez lire davantage à ce sujet dans la ressource « Élaborer des plans pour les employés – pour les leaders ».

En vous abstenant d’imposer votre propre solution au problème, vous aidez l’employé à éviter de simplement accepter vos conseils pour vous donner raison.

Reformuler

Montrez que vous écoutez et que vous comprenez.  Encouragez les employés à continuer de parler, et donnez-leur l'occasion de clarifier leurs idées et leurs sentiments si vous semblez faire fausse route. Établissez un contact visuel, souriez, hochez la tête et utilisez des expressions comme « Oui », « OK », « Ha, ha! », « Ah! », « Hum! », « Oh! », « Continuez ».

Paraphrasez ce que l’autre personne dit. Retournez le message entendu à l’autre personne. Ne vous contentez pas de répéter les mêmes phrases, mais utilisez plutôt vos propres mots pour reformuler ce que la personne a dit. C’est ainsi que vous montrerez à la personne que vous comprenez.

  • Servez-vous de phrases comme :
    • Il semble que...
    • Vous dites donc que…
    • Il semblerait bien que...
    • On dirait que...
    • Ce que je comprends, c’est que...
    • En d’autres mots...
    • J’ai l’impression que...
    • Vous voulez dire que…
    • Vous avez l’impression que...
    • Je sens que...
    • Je me demande si...

Reflétez la signification et les sentiments exprimés par l’autre personne. Parfois, le contenu littéral du message est moins important que les sentiments, les idées et les opinions qu’il véhicule. Lorsque vous discutez avec un employé qui vit des émotions intenses, comme de la colère, de la frustration ou de l’anxiété, essayez d’identifier l’émotion pour qu’il sache que vous comprenez comment il se sent.

  • Par exemple : 
    • Il semble qu’il vous a vraiment contrarié.
    • J’ai l’impression que vous trouvez cette situation assez frustrante.
    • Je sens que vous êtes très découragé.
    • J’ai l’impression que vous êtes malheureux de la situation.

Par exemple, si un employé vous dit : « J’ai enfin terminé ce satané projet! », vous pourriez reformuler comme suit : « On dirait que vous avez eu de la difficulté avec ce projet ». La manière dont vous le dites est aussi importante que ce vous dites ici. Si vous donnez l’impression d’être condescendant, sarcastique ou passif agressif, il est fort probable que l’employé se fermera. La notion de communiquer clairement comprend vos mots et votre langage corporel.

Rechercher des éclaircissements

Parfois, lorsque nous sommes perturbés, nos propos peuvent dépasser notre pensée ou nous réagissons d’une façon émotive qui ne produit pas le résultat escompté.

Bon nombre d’entre nous croient avoir une bonne faculté d’écoute, et nous nous faisons un point d’honneur d’avoir entendu exactement ce que notre interlocuteur nous a dit, mais nous devons éviter de corriger son observation s’il nous répond « Ce n’est pas ce que j’ai dit ». Peut-être est-ce précisément ce qu’il a dit, mais non ce qu’il voulait dire.

Donnez-lui une chance. Donnez-lui le temps de préciser sa pensée… pour vous aider à comprendre ce qu’il voulait vraiment dire. Vous aurez écouté pour comprendre lorsque votre interlocuteur conviendra que ce que vous avez entendu correspond vraiment à ce qu’il voulait dire.

Résumez le message de l’autre personne. Une méthode efficace pour saisir l'essentiel de ce qu’une personne exprime consiste à résumer le message principal à intervalles réguliers ou à la fin de la conversation. Cette étape est particulièrement importante si vous avez conclu une entente ou pris une décision concernant les prochaines étapes, afin de vous assurer que les deux parties ont convenu des mêmes choses.

Posez des questions d’éclaircissement. Si vous ne comprenez pas entièrement le message de l’employé, posez des questions pour clarifier la situation. Par exemple :

  • « Ce que j'ai compris de ce que vous m’avez dit, c'est que... Est-ce que c'est bien ce que vous vouliez dire? » 
  • « Je m’excuse, je n'ai pas bien compris. Que voulez-vous dire? » 
  • « Que voulez-vous dire par...? » 
  • « Pouvez-vous me donner un exemple? »
  • « Pouvez-vous m'en dire plus sur...? »
  • « Comment avez-vous trouvé...? Quels sont vos sentiments à ce sujet? » 
  • « Vous semblez vraiment contrarié. Est-ce qu'il s'est passé quelque chose? » 
  • « Que comptez-vous faire à ce sujet? » 
  • « Selon vous, comment devrions-nous résoudre cette situation? »

Lorsque vous élaborez des solutions à des problèmes de rendement uniquement à partir de votre point de vue, les solutions ne permettent jamais de résoudre complètement les problèmes et pourraient même créer un système qui les favorise.

Il faut du temps pour maîtriser complètement cette technique, mais vous pouvez l’appliquer dès maintenant. C’est très peu risqué et probablement très avantageux pour vous de l’essayer.

Vous pouvez utiliser le concept « écouter pour comprendre » comme point de départ pour faire participer vos employés à l’élaboration de solutions à leurs problèmes, à partir de leur point de vue.

Microapparentissage de 10-minutes

Utilisez la Fiche de conseil : Écouter pour comprendre | PDF comme rappel des concepts Écouter pour comprendre.

Une version accessible est aussi disponible.

Pour connaître d’autres sujets de l’apprentissage en ligne, consultez la ressource Modules de microapprentissage

Références

  1. Baynton, M. (2011). Resolving Workplace Issues. Waterdown, Ontario: Self-Published.

Mary Ann Baynton